Aux quatre vents

Publié le par Lilou

Aux quatre vents

Sylvestre, elle se l'était longtemps imaginé en queue de pie, les basques flottant dans les courants d'air, un chapeau haut-de-forme, souriant. Les spectacles de cabaret télévisés de fin d'année avaient dû largement contribuer à son imaginaire bien garni...

Sylvestre était un prénom mystérieux qui volait la vedette au 31. Le 31. C'était une autre histoire : comment faire entrer un peu de poésie là où tout est calculé, à la seconde près ?

Cette passion qui régnait autour d'une trotteuse dans sa course folle. Cet engouement autour du défilé des dernières secondes de la dernière minute. Cette hystérie provoquée par un décompte de 5 secondes ponctué par un cri collectif pour souhaiter de bonnes choses à son prochain. Maya était totalement imperméable à la danse toute convenue des chiffres. Trop ancrés, condamnés à garder le quai, sans surprise, cadencés. L'ouverture d'un bal ennuyeux, préparé au cordeau. 

Elle préférait, préfère toujours, vagabonder. Prendre la main de ce Sylvestre. Laisser son regard se perdre dans les bulles du champagne. Imaginer ce qui se cachait derrière ce mystérieux vol-au-vent, plat qu'on préparait invariablement pour les fêtes.

​​​​​​Elle vivait le 31 dans une autre dimension. Peut-être parce que les adultes l'effrayaient. Oui. Sans doute. Ces adultes qui hurlaient sans crier gare ''bonne année''. Ces embrassades soudaines et parfois un peu brutales. Sans doute alcoolisées. Et surtout, ces regards : il y avait de l'animalité, de la folie. Les survivants de l'année qui s'achevait. Des marathoniens sur la ligne d'arrivée. On l'a fait, bordel !

''Bonne année''. Ça balançait entre le souhait et l'injonction de réussir à faire quelque chose de ces 365 jours qu'on a la chance de se voir confier. Observer ce moment était assez intéressant : elle découvrait soudain ses parents, oncles et tantes débarrassés de leurs oripeaux d'adultes. Des enfants !

 

 

 

 

 

 

 

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M
Je suis content de ne pas rencontrer M.Sylvestre cette année, toute ses embrassades qui m'oppressent qui manquent cruellement d'intimité et d'authenticité, moi qui suis spontané, c'est anachronique se décompte du temps alors que c'est un temps utopique/illusoire.
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