Maya se redresse tenant la feuille, pensive.
Blanche. Il y a du travail.
Elle avait pendant tant d'années été capable d'en noircir sans fin. Se dépêchant de rédiger, de cracher sur le papier tous ces mots, toutes ces idées qui se bousculaient dans sa tête et menaçaient de disparaître si elle ne se hâtait pas. C'était à la fois plaisant et épuisant. Mais quelle chance était-ce que ce tonneau sans fond d'histoires à raconter !
Et puis la source s'est tarie, sans crier gare. Du jour au lendemain. Maya avait d'abord pensé que son cerveau lui demandait une pause lexicale. Stop. Rechargeons les batteries.
Une semestre. Puis le COVID. Un mois encore. Et encore. Un an. Le cap de la première année est inquiétant pour qui croit encore pouvoir recharger sa batterie. Il y a bien eu quelques intermèdes - cartes de voeux, d'anniversaire, quelques lettres - mais les cendres refusent de faire naître un beau feu. Elles brillent à peine, dans l'obscurité, comme un vieux cœur fatigué qui menace de s'éteindre si l'on s'acharne à le solliciter.